Situations préjudiciables

L’infantilisation

Quotidiennement et le plus souvent inconsciemment dans l’accompagnement des personnes âgées, les soignants infantilise les résidents, cela est très négatif pour la personne dont il est question et ça ne répond pas à ses besoins.

J’ai pour ma part eut beaucoup d’opportunités d’observer mon public dans divers ateliers. Thierry Darnaud parle dans son ouvrage de l’importance de l’animation dans une maison de retraite, il en donne le sens étymologique qui est de donner de la vie. Mais il aborde également le fait que certaines d’entre elles peuvent inconsciemment engendrer comme travers d’infantiliser les personnes âgées.

Situation 1

Ce matin l’activité au résidentiel est la lecture de contes. C’est moi qui l’ai proposé et qui m’en occupe. J’aménage l’espace en plaçant les chaises en cercle avant que les résidents n’arrivent. Je propose aux personnes présentes dans le salon de participer à l’activité tandis que certains résidents descendent de leur chambre pour se joindre à nous. Je lirai des contes de Perrault, je commence par Barbe bleue et termine par Le petit Chaperon rouge. Nous discutons un peu sur la fin de ce conte qui se finit assez mal puisque le Chaperon rouge finit par se faire dévorer par le loup. Je leur propose de lire une prochaine fois cette même histoire mais des Frères Grimm qui nous exposerait une toute autre fin, nous discutons un peu aussi de la morale de l’histoire et ce sont les bénéficiaires qui évoquent les différentes possibilités. Il est l’heure du repas et je clôture donc l’activité en leur souhaitant un bon appétit.

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Avant de commencer la lecture, j’ai senti les résidents très enthousiaste et content de s’attarder sur de grands classiques. Ils sont très attentif et réceptif pendant les contes et nous avons beaucoup discuter, même « critiquer » les différences en fonction de l’auteur. Pour ses raisons, j’ai pensé que cette activité avait été bénéfique pour eux, car ils ont pu réveiller des souvenirs de leurs enfances ou avec leurs enfants et petits-enfants. Mais cette simple lecture de conte comme activité est préjudiciable. Dans une institution comme celle-ci, ou les incapacités et accompagnements ne sont que grandissants, il faut être bien attentif à ne pas infantiliser la personne âgée. Sophie Laublin dans son article décrit plusieurs formes d’infantilisation possible et ses effets sur la personne accompagnée, mais aussi sur les soignants. Il y a beaucoup de façons différentes d’infantiliser une personne en maison de repos, mais cela se fait, pour la plupart du temps, de manière inconsciente.

Dans cette situation, on peut retrouver une forme d’infantilisation. En effet, le support (média) utilisé qui sont les contes de Perrault sont initialement conçu pour des enfants et nous amène donc facilement à ce « renvoi en enfance ». Cela est risqué, surtout en institution où une personne présente a peut-être été infantilisé deux fois auparavant par d’autres soignants. Cela peut la renvoyer à une image peu valorisante d’elle-même et à long terme peut même causer des troubles du comportement (violence, agressivité..)

Je fais l’hypothèse que l’éducation aux médias pourrait éviter l’infantilisation dans cette situation. En effet, j’ai décris une discussion et critique à la fin des lectures mais elles furent très courtes car le temps n’y était plus et que ce n’était, en sois, pas prévu. Pourtant il me semble qu’en terme d’objectifs et d’apports poursuivis pour ses personnes, cette partie est la plus importante. Pour limiter au plus l’infantilisation, je peux modifier mon support et choisir des récits avec un vocabulaire et une histoire plus complexe comme ceux de Guy de Maupassant par exemple. Mais pour faire réfléchir, stimuler les personnes présentes et créer un réel échange, je pense que faire de l’éducation aux médias sur l’histoire racontée serait bénéfiques. « Développer cette approche éducative s’apparente à un bon moyen de stimuler leurs fonctions intellectuelles, leur mémoire et leur langage et de leur faire prendre conscience de l’importance d’avoir un esprit critique face à l’information » .

 

Situation 2 

Le petit-déjeuner est terminé aux Myosotis et l’ergothérapeute a rassemblé les résidents dans la salle à manger. Ce matin c’est un atelier lecture qui est encadré par Caroline (ergo) et moi-même. Ma collègue a apporté un livre pour enfant qui raconte les fables avec d’autres mots. Elle en raconte deux pendant que je distribue à boire à tout le monde et que je rassemble les personnes qui déambule. Caroline doit partir en réunion, je décide donc d’en raconter une de plus, celle du corbeau et du renard. Je raconte en tentant de faire participer les personnes présentes. Madame Z réagis à ce que je dis et semble se souvenir de cette fable, certains sont attentifs et d’autres passifs. Je termine la lecture et il est l’heure de manger, je rassemble donc tout le monde autour des tables pour le repas.

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Il s’agit dans cette situation de personnes démentes, comme dit précédemment, Myosotis est le nom de l’unité protégée. Le but premier des ateliers dans ce service est d’offrir un cadre sécurisant et de bien-être aux bénéficiaires. Ensuite on tente de stimuler les capacités persistantes de chacun pour lui permettre de maintenir son autonomie. Ce choix d’activité offre donc un contexte comme il est attendu, tout le monde est réuni avec une boisson dans le calme une petite lecture,… Cela offre une certaine sérénité à tous. Malgré cela je trouve tout de même que le support n’est pas adapté. Je me trouve en face de personnes démentes ayant des capacités limités au niveau cognitif et j’en suis bien consciente mais l’infantilisé ne les feront pas se sentir mieux, au contraire, ils pourraient régresser.

Je trouve que l’éducation aux médias n’est pas adapté au public dont il est question dans cette situation. Mon hypothèse est qu’il suffirait de changer de support, si les fables sont le sujet, lisons les fables d’origine avec leur littérature plus complexe. Comme le dit Thierry Darnaud, « Ce n’est pas la qualité intrinsèque de l’activité qui prime, le plus important c’est l’esprit dans lequel l’atelier est pensé et animé ». (DARNAUD T. p.135.) Une grande partie des personnes présentes sont à un stade avancé de leur démence et ont une compréhension très limité comme pour ceux atteint de la maladie d’Alzheimer qui à un certain stade de la maladie ne sont plus capable de comprendre certains concept et de suivre un discourt. Pour ces personnes, on pourrait penser que dans cet atelier ils sont dévalorisés par cet incompréhension mais le contexte sécurisant leur apporte beaucoup comme la socialisation, ils se tiendront dans le groupe et cela est très important avec des personnes ayant ce types de troubles. Ce type d’atelier est donc bénéfique dans ce genre d’unité mais il faut être attentif aux choix des lecture pour ne pas infantiliser les personnes et risquer d’accroître leur troubles.

Sources

LAUBLIN S.(2008), L’infantilisation de la personne âgée en établissement gériatrique. Le journal des psychologue, 256. Repéré à http://www.cairn.info/revue-le-journal-des-psychologues-2008-3-page-34.htm. Consulté le 02.01.16.

DARTIGUES J.-F. et al.(2013), Parlons-en! Alzheimer, Saint-Herblain: Gulf Stream.

LE MAINTIEN A DOMICILE. L’éducation aux médias des personnes âgées.http://www.maintienadomicile-conseils.com/cadre-de-vie/education-aux-medias-personnes-agees. Consulté le 28.12.14.

DARNAUD T.(2012), Papé et sa maison de retraite, Lyon: Chronique sociale.

CROISILE B.(2014), Alzheimer, Paris: Odile Jacob.

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